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Aux grands hommes : un poème de Dominique Mutel
lundi 1er octobre 2018
AUX GRANDS HOMMES
Robespierre, Saint-Just, Couthon, LebasTous je les aime, ceux que l’on abatD’un mot crapuleux, d’un œil odieux.Oui, j’aime chez eux l’airain de leurs yeux,Leur front plein d’orgueil, l’absolu des vuesMalgré leurs défauts, malgré leurs bévues.J’aime ces hommes terribles, immensesQui ont mis dans la funeste balanceDu destin le lourd peson du bonheur,De la liberté contre le malheur,Vieille laisse mise à l’affreux collierDe l’hydre poussant l’enfant à mendier,La mère à pleurer son lait, et le pèreA ressentir la dent de la misère.D’autres, il est vrai, dans l’encens des messesParfumaient l’âme nue de leurs bassessesEt s’offusquaient, dans le sel des salonsQue l’on pût oser relever le front.J’aime ces parias remplis de grandeurQui voulaient que le manant fût acteurDans une pièce longtemps mal jouée,Qu’en coulisses un Dieu avait huéeEn vain. Ils ont du levier de l’idéeLevé un cœur de morale ridée,Et pourfendu les haineux préjugés,Ouvert la pensée comme un fruit mangéDoucement, avec lenteur et amour.Oui, ces Prométhée voués aux vautoursSavaient que vertu vraie n’a d’éclat queDans l’exemple, que de l’étoile antiqueOù brille l’esprit du grand DémosthèneDevait naître le phare qui y mène.Oui, au risque de choquer l’opinionVeule, l’esprit vil suivi de minions,J’aime de leur vœu adressé à DieuL’audace d’esprit d’antiques aïeux.
Ils ont labouré la très vaste et sombre
Plaine du sommet de la Tribune, ombres
Pleines de clartés guidées par le rêve
Dans le cauchemar des combats sans trêve.
Voyez-vous, j’aime la Révolution
Ses Montagnards, œil de la Nation,
Ses Girondins et le verbeux Vergniaud,
Roland, Barnave et Brissot, faux agneaux,
Ses Hébertistes et ses Dantonistes,
Danton et Hébert, tous antagonistes,
L’Ami du Peuple, le Père Duchesne,
Tous attachés à une longue chaîne.
Je les prends tous, n’en déplaise aux racleurs
De fond d’encrier en retard d’ailleurs
Sur l’Histoire et bien qu’il soit de bon ton
De nier cette ruade, admettons
Donc alors que cet avenir, le nôtre
Est sorti de ce passé qui est vôtre,
Grands hommes nobles, combien magnifiques,
Dont l’esprit bouillait de rêves épiques.
Oui, j’aime tous ces Christophe Colomb
De l’humanité, avec cet aplomb
Du grand courage et des fortes vertus.
Ils ont fait saisir à ces fronts obtus
Que de la terre où s’accroche l’ortie
Au chardon, des fleurs aux pâleurs d’hostie
Pouvaient pousser et ont joué dans l’antre
Et la caverne de Platon les chantres
De la conscience. Que vous êtes beaux.
Vous allumez le feu des idéaux.
Seul l’âne broutant toujours l’âcre foin
Obscur et moisi ne peut pas au loin
Voir dans la sombre glèbe l’étincelle
Que vos forts esprits ont jetée pour celles
Et ceux dont les yeux perdaient la lumière.
Oui je les aime et salue Robespierre.