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Dialogue entre Francisco Torres du Chili et l’ARBR

mardi 12 septembre 2023

Avec l’aimable et passionnée participation de notre amie Elise Voisin pour la traduction en simultané et ensuite pour la réécriture de ce dialogue nous avons choisi de publier cet entretien en dépit des difficultés de la langue.
Nous sommes ici aux antipodes des propos trop souvent répétés depuis deux siècles concernant Robespierre.
L’ARBR s’honore de pouvoir publier le témoignage de citoyens engagés de l’Amérique latine et même si l’image de Robespierre est majoritairement négative, de voir que notre révolutionnaire fait l’objet d’études et de réflexions est tout à fait réconfortant .

Dialogue avec notre ami robespierriste chilien Francisco Torres à propos de son texte : Allende - Robespierre

La traduction a été réalisée par notre amie Elise Voisin, membre du conseil scientifique de l’ARBR, à la fois pendant les échanges avec les membres du CS présents et ensuite en coordination avec notre ami chilien.

Ci-dessous les réponses de Francisco à certaines (pas toutes) de vos questions. J’ai mis sa réponse et ma traduction. Je suis plus à l’aise avec l’espagnol de tous les jours, ainsi c’est un vrai défi que vous m’avez donné ! Mais j’ai adoré ça, Francesco est passionnant et brillant ! J’espère juste vous donner la traduction la plus exacte de ses propos ! Parce que brillants vous l’êtes vous aussi ! Cette collaboration est exaltante j’espère qu’elle sera prospère et qu’elle fera sauter des verrous linguistiques ! Je vous souhaite une belle soirée à tous les deux ainsi que le meilleur.
Amicalement. Elise

Peut – on considérer aussi que l’échec d’Allende et la mise en place d’une dictature militaire sanglante (je pense à Jara, torturé à la face du monde, à Néruda dont on sait aujourd’hui qu’il fut vraisemblablement empoisonné) et aux milliers de morts qui ont suivi soit due à une sorte « d’incompréhension » de la doctrine robespierriste et de l’hésitation du MIR à mettre en place une politique de la Terreur je le rappelle selon Robespierre devait s’exercer contre les ennemis de la liberté ? (Alcide)

FRANCISCO : Sí, ese es el punto central para mí. ¡Esta es la intención de mi escrito ! Mi padre, por otro lado, fue militante del MIR, y escribo bajo una anatema ; bajo cierta critica a la revolución a si misma ; critica a Allende por girondinismo, etc.
Robespierre me sirve justamente para mostrar aquello, Robespierre para mi es en primer lugar, pero no ante todo, el nombre de una operación de universalidad que causa una desnacionalización a la via chilena al socialismo.

FRANCISCO : Oui, c’est le point central selon moi. C’est même l’intention de mon écrit ! Mon père, d’un autre côté, était militant du Mouvement de la gauche révolutionnaire (MIR), et j’écris sous un anathème, sous une certaine critique de la révolution elle-même, critique Allende pour girondinisme, etc.
Robespierre me sert justement à montrer cela, Robespierre pour moi est d’abord, mais pas avant tout, le nom d’une opération d’universalité qui cause une dénationalisation de la voie chilienne au socialisme.

Vous parlez de contre-révolution à propos de 1793 . J’ai le sentiment que vous commentez un contre sens. La contre-révolution à cette époque est intérieure et extérieure. (Alcide)

FRANCISCO : No, aquí creo que hay una confusión, sea quizá por el espíritu filosófico del texto ,o por la traducción. Yo lo que digo, es que Robespierre “descubre”, mediante la practica de la dictadura popular democrática (1793), la ley de la contrarevolución, que Allende NO descubre en 1973.
En segundo lugar, digo, que el gobierno popular de la revolución,en su concepcion integra la contrarevolución en su propio concepto, porque actua con medidas de fuerza, teniendo en la mente al “enemigo”. Cosa que Allende no hacía. Esta comprensión la tenía Robespierre, porque es mas cercano al principio de contradicción, al realismo político ; mientras que Allende es mas cercano al principio de identidad, a Parménides. Por eso, les dije en el encuentro por zoom que tuvimos, mas o menos metafóricamente, mas o menos de forma real : que la fasicinacion de Allende por el Espiritu de las leyes de Montesquieu fue lo paralizó (antes) cualquier resistencia al Golpe de Estado de Pinochet.

FRANCISCO : Non, je crois qu’il y a une confusion, peut-être par l’esprit philosophique du texte, ou par sa traduction. Ce que je dis, c’est que Robespierre « découvre » par la pratique de la dictature populaire démocratique (1793), la loi de la contre-révolution qu’Allende lui NE découvre pas en 1973.
En second lieu, je dis que le gouvernement populaire de la révolution intègre dans sa conception la contre-révolution dans son propre concept, parce qu’il agit avec des mesures de force et en gardant « l’ennemi » à l’esprit. Ce qu’Allende ne faisait pas. Robespierre avait cette compréhension, parce qu’il est plus proche du principe de contradiction, du réalisme politique ; tandis ce qu’Allende est plus proche du principe d’identité de Parménide. C’est pourquoi, je vous ai dit lors de notre entretien zoom que, plus ou moins métaphoriquement, plus ou moins de forme réelle : la fascination d’Allende pour l’Esprit des lois de Montesquieu a paralysé (avant celui-ci) toute résistance au coup d’État de Pinochet.

Pour vous, en 1971-72 l’élection de Allende fut-elle une sorte de révolution ? (Alcide)

FRANCISCO : Un destacado historiador de la izquierda chilena, dice que fue un “reformista revolucionario”. Estoy de acuerdo con eso.
Es lo mas avanzado que ha dado en términos de representación política, la dimensión política popular en nuestra historia.
Allende equivale a un pasaje (y 1970=“passage” como diría André Breton) hacia la revolución, que su teoría (la teoría chilena al socialismo=, sin embargo, lo contemplaba como un camino atravesados por etapas. Mientras que Robespierre es mas cercano a cierta permanencia.

FRANCISCO : Un éminent historien de la gauche chilienne a dit qu’il était (Allende) un « réformiste révolutionnaire ». Je suis d’accord avec cela.
Il représente la plus grande avancée, tant en termes de représentation politique, que dans la dimension politique populaire de l’histoire chilienne.
Allende équivaut à un passage (1970=« passage » comme dirait André Breton) vers la révolution, même si sa théorie (la théorie chilienne au socialisme) lui faisait contempler celle-ci comme un chemin à parcourir par étapes alors que Robespierre lui est plus proche d’une certaine permanence.

Il est effectivement toujours très compliqué ( et anachronique) pour un historien de comparer (ou tout au moins de faire quelques analogies) entre deux époques et/où deux personnages ! (M. Decriem)

FRANCISCO : Claro que sí. Pero el efecto de anacronía o la interpretación simbolica o figural, no solo es necesario, sino que bien operado contiene cierta virtud.

FRANCISCO : Absolument. Mais l’effet anachronique ou l’interprétation symbolique ou figurative est non seulement nécessaire, mais, quand elle est bien opérée celle-ci contient une certaine vertu.

Ainsi la victoire ( difficile) d’Allende aux présidentielles au Chili peut-elle avoir quelques ressemblances avec la victoire de la Montagne en juin 1793 ? (M. Decriem)

FRANCISCO : No exactamente. Mientras que en Francia en 1793 estaba la lucha de clases en caliente, aquí en 1970 todavia estaba contenida en la representación. Ya en 1972 y 1973, podemos hablar de una delimitación mas marcada entre un sector mas moderado o allendista y otra mas “ultra” de avanzar sin pensar.

FRANCISCO : Pas tout à fait. Tandis qu’en France en 1793 se déroulait la lutte des classes à chaud, ici en 1970, tout était dans la représentation. Déjà en 1972 et 1973 nous pouvons parler d’une délimitation plus marquée, entre un secteur plus modéré ou allendiste et un autre, plus « ultra » qui avançait sans réfléchir.

De même, le complot fasciste préparé avec la CIA américaine contre Allende peut-elle se comparer à la conjuration du 9 thermidor ? (M. Decriem)

FRANCISCO : De ninguna manera. Si bien ambos golpes, son de la contrarevolución, en la caída de Robespierre se constituyó un frente único desde la extrema izquierda a los liberales, mientras que en Chile la ultraizquierda no combatió nunca a Allende : no tuvo la fuerza, la dispoiscion, ni la convicción para hacerlo. Bajo las apariencias grafómanas, lo respetó quizá bastante

FRANCISCO : En aucun cas. Bien que les deux coups d’états sont de la contre-révolution, à la chute de Robespierre s’est constitué un front unique de l’extrême gauche aux libéraux, alors qu’au Chili l’extrême-gauche n’a jamais combattu Allende : elle n’avait ni la force, le mépris, ou la conviction pour le faire. Sous les apparences graphiques, il l’a peut-être assez respecté.

Je ne connais pas assez l’histoire de votre pays bien qu’ayant manifesté en France mon soutien à Allende et ayant accueilli en 1974 pour quelques nuits l’un de vos compatriotes en exil mais je reconnais que la manière dont vous mettez en perspective l’histoire du coup d’État de Pinochet et thermidor même si elle peut surprendre est intéressante car elle pose en quelqu sorte la question de l’usage légitime de la violence révolutionnaire. (Alcide)

FRANCISCO : Asi me parece. Añadiría, que esa operación también de equivaler Pinochet= Robespierre, que en Chile hace inconscientemente la Concertación. Sobre el desplazamiento del cuadro 9 Thermidor de Monvoisin, que mienta la caída de Robespierre, al Congreso, supuestamente porque habría caído el tirano Pinochet. Esta equivalencia, este signo =, es claramente socialdemócrata a lo menos.

FRANCISCO : je suis d’accord avec cela. J’ajouterais que cette opération équivaut aussi à Pinochet= Robespierre, qui génère inconsciemment la concertation au Chili. Comme le déplacement du tableau du 9 Thermidor de Monvoisin nié lors de la chute de Robespierre, mais justifiée au congrès et ce prétendument parce que le tyran Pinochet serait tombé. cette équivalence, ce signe =, est clairement social-démocrate.

- Dans votre texte, qui débute par une allusion à Mitterrand, autre président social-démocrate, qui incarna la « gauche » au pouvoir pendant une décennie. A l’époque, oserai-je vous le rappeler Mitterrand doit son élection à la présence d’un parti communiste fort, (20 à 21 % aux législatives de 1978) qui a choisi la voie démocratique et électorale autour d’un programme commun de gouvernement auquel d’ailleurs Mitterrand tournera rapidement le dos pour engager notre pays vers le libéralisme économique. Le PC y signera d’ailleurs son déclin. Or Mitterand, en France c’est l’anti-robespierre par excellence ; je n’irai pas jusqu’à dire, ce serait une uchronie, qu’il représente les girondins, mais il en représente l’idée. On le constatera lors du bicentenaire.
Est-ce que selon vous l’expérience mitterrandienne et celle de Allende trouvent des points communs dans votre analyse ? (Alcide)

FRANCISCO : Luego de nuestra conversación me quedé reflexionando, que : si ustedes dicen que es excesivo llamar girondino a Mitterrand, entonces estaría mas a la derecha de lo que a lo que en una primera aproximación el concepto indica. Yo diría que no hay demasiada semejanza, salvo, quizá, por cierto deseo de una ecuación, que esta mediada por la lectura italiana de la via chilena al socialismo, con Enrico Berlingue (febrero 1974).
En la que llamaba a sacar una “lección” de la “tragedia chilena”, de forma centrista y reformista.PCI fue un partido anti-jacobino, y anti-autonomía obrera, etc
Tal como el PCF. Vuelvo al punto. Entonces, Miterrand que le abrió la paso al futuro neoliberalismo, es mas derechizado en ese sentido que cierto porcentaje de jacobinismo que hay la sangre girondina de Allende. Miterrand y el intento de una Unidad Popular en Francia es una pantomima.

FRANCISCO : suite à notre conversation j’ai énormément réfléchi et : Si vous dites qu’il est excessif de dire que Mitterrand était Girondin, alors il serait plus à droite qu’à ce que dans une première approximation le concept indique. Je dirais qu’il n’y a pas trop de ressemblance, sauf, peut-être, par le désir certain d’une équation régie par la lecture italienne de la voie Chilienne au socialisme avec Enrico Berlinguer (février 1974) dans laquelle celui-ci appelait à tirer une « leçon » de la « tragédie chilienne » de manière centriste et réformiste. PCI était un parti anti-jacobin, et anti-autonomie ouvrière, etc.
Comme le PCF. Je reviens sur ce point. Alors, Mitterrand qui a ouvert la voie au futur néolibéralisme est, en ce sens, plus à droite qu’un certain pourcentage de jacobinisme présent dans le sang girondin d’Allende. Mitterrand et la tentative d’unité populaire en France est alors un pantomime.
Mai 2022