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2021 40e anniversaire de l’abolition de la peine de mort

Article paru dans le numéro 117 de l’Incorruptible

samedi 10 février 2024

En cette année 2021 nous célébrons le 40°" anniversaire de l’abolition de la peine de mort en France. Le 17 septembre 1981, Robert Badinter, alors qu’il est le garde des Sceaux, monte à la tribune de l’Assemblée nationale pour plaider l’abolition de la peine de mort. Elle est acquise à la majorité et le 9 octobre suivant, la loi sera définitivement promulguée.

Peu le savent, mais presque deux cents ans plus tôt eu lieu en France le premier débat parlementaire dans le monde sur la peine de mort.
C’était le 30 mai 1791, avec le projet de loi visant à l’abolir ; Son rapporteur était Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, mais son soutien le plus fervent fut Maximilien de Robespierre.

L’abrogation de la peine capitale ne sera pas votée mais l’on doit à Robespierre, dans son discours devant l’Assemblée constituante du 30 mai 1791 d’avoir jeté la base argumentaire du mouvement abolitionniste. Dans un discours riche de références à l’antiquité, Robespierre, va tour à tour, démontrer le caractère injuste de la peine de mort, son inefficacité et même son effet négatif sur la société. Ce sont les mêmes arguments qui seront repris deux siècles plus tard par Robert Badinter.

D’abord, la peine de mort est injuste car une fois que le criminel a été appréhendé, c’est du côté du groupe qu’est la force et « dans la société quand la force de tous est armée contre un seul, quel principe de justice peut l’autoriser à lui donner la mort ? » ; pire, sil a peine capitale est alors prononcée, c’est un crime d’État nous suggère Robespierre et la marque de la tyrannie et de l’ignorance.

La peine de mort n’est pas dissuasive, cet argument sera également fortement discuté lors des débats devant l’assemblée nationale en 1981, déjà Robespierre s’en départissait, se moquant en interpellant l’Assemblée constituante : « Qui vous l’a dit ? Avez-vous calculé tous les ressorts par lesquels les lois pénales peuvent agir sur la sensibilité humaine ? ».

La peine de mort est inefficace parce que le plus terrible pour « l’homme social, c’est l’opprobre » et le but de la peine doit être de « prévenir le crime par la crainte de les encourir » et non « tourmenter les coupables ».

De plus, en ôtant la vie au criminel, on se prive de la possibilité de son amendement, sans compter par ailleurs le fait que l’erreur judiciaire est possible.
Enfin, là où l’on pratique la peine de mort, comme au Japon indique Robespierre, la criminalité est plus importante, car la cruauté appelle la cruauté et banalise une image désacralisée de la vie.

Et ainsi de finir son discours : « On a observé que dans les pays libres, les crimes étaient plus rares et les lois pénales plus douces. Toutes les idées se tiennent.
Les pays libres sont ceux où les droits de l’homme sont respectés, et où, par conséquent, les lois sont justes. Partout où elles offensent l’humanité par un excès de rigueur, c’est une preuve que la dignité de l’homme n’y est pas connue, que celle du citoyen n’existe pas : c’est une preuve que le législateur n’est qu’un maître qui commande à des esclaves, et qui les châtie impitoyablement suivant sa fantaisie.
Je conclus à ce que la peine de mort soit abrogée. »

Alexandre Braud, avocat au barreau de Béthune